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AMERICANAH - CHIMAMANDA NGOZI ADICHIE

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femelu, quel beau prénom de personnage... A chaque fois qu'il apparaît dans la page, les autres mots semblent s'arrêter devant sa vibration spéciale, son rayonnement éclair. Ifemelu, cela commence comme une salutation, puis on entend « femme », et cela se referme comme un souffle sur une consonance africaine. Ce prénom flamboyant contient à lui seul tous les sujets du roman. Le respect de l'autre, ou comment l'amour tourne parfois à un envoi de bonnes ondes in absentia. La force qu'une femme peut déployer pour affronter son destin. Et la condition noire, du Nigeria aux Etats-Unis, entre lesquels Ifemelu fait le grand écart.

Son premier mode d'expression est électronique : Ifemelu tient un blog à succès, intitulé Observations diverses sur les Noirs américains (ceux qu'on appelait jadis les nègres) par une Noire non-américaine, dont quelques courts billets émaillent le roman. La différence de ton entre les écrits d'Ifemelu, blogueuse au laser, calme et didactique, et l'écriture de Chimamanda Ngozi Adichie, auteur de cette saga puissante et désordonnée, aussi drôle que sensible, donne un grand relief au livre. Impossible de résumer ces ­chassés-croisés entre présent et passé, émigrants et natifs restés au pays, tristesse et drôlerie. Impossible de lâcher ces aventures hautes en couleurs de vernis à ongles, couleurs d'extensions réalisées par des coiffeuses à la peau comme des patchworks, couleurs de la robe en jersey vintage années 1960 achetée sur eBay par Ifemelu, qui raconte alors sur la Toile : « Quand sa propriétaire la portait, les Noirs américains n'avaient pas le droit de vote parce qu'ils étaient noirs. Et peut-être la propriétaire était-elle une de ces femmes, sur la célèbre photo sépia, massées devant les écoles en criant "Singes !" à des petits enfants noirs. »

Ifemelu n'est pas seule. Dans l'ombre, un homme marche à ses côtés : Obinze. Même s'ils n'ont pas réussi à poursuivre leur route ensemble (l'un ayant tenté piteusement sa chance à Londres avant de retourner à Lagos, l'autre devenant une vraie Americanah), ils se sont tellement aimés dans leur jeunesse, que leurs trajectoires parallèles sont comme aimantées à distance. La pulsation de cet amour bat en sourdine au coeur de ce roman tonitruant, rageur, corrosif. Comme une berceuse qui protège de toutes les désillusions de l'existence.— Marine Landrot

 

Source : Télérama



16/06/2015
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