Bienvenue dans mon Univers

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FRANCOISE-LAURE ADLER



Et si Françoise Giroud était encore plus grande que sa légende ? Plus riche, plus complexe, plus intéressante que l'image d'Epinal de la jeune femme talentueuse qui devint la première journaliste de son temps ?
La trajectoire, on la connaît : engagée par Hélène Lazareff à la création de Elle puis cofondatrice de L'Express, et enfin chroniqueuse au Nouvel Observateur, l'ex script-girl de Jean Renoir avait le sens des phrases assassines : la griffe sous le sourire enjôleur. Compagne et complice de Jean-Jacques Servan-Schreiber, farouche opposante à la guerre d'Algérie, amie fidèle de Mendès France et de Mitterrand, celle qui "inventa" la Nouvelle Vague et roulait en décapotable fut une grande amoureuse, aimant le plaisir autant que le devoir. Femme politique, cette fille d'immigré turcs ne passa jamais son bac, mais devint Secrétaire d'Etat à la condition féminine sous Giscard d'Estaing. Travailleuse acharnée, élégante en diable, éprise de liberté, c'était une visionnaire, qui incarna la naissance de la femme moderne.
Mais on découvre ici que ce tempérament passionné a aussi ses zones d'ombre - expérience de la trahison, coup de folie passionnelle, tentative de suicide, mort d'un fils... Et si une phrase de sa mère, sur son lit de mort, avait déterminé sa trajectoire et son destin ?
A travers le portrait d'une femme d'exception, c 'est une époque de feu que ressuscite ici Laure Adler : un temps, pas si lointain, où l'on savait encore se battre pour des idéaux.

Extrait

La fille de son père

De son enfance, elle ne parlait pas. Disait ne pas s'en souvenir. C'était faux. Elle avait une excellente mémoire. A Claude Glayman, elle confie qu'elle n'en éprouve aucune envie : «L'enfance ça vous remonte si vite à la gorge. Il faut la garder pour soi. C'est comme les larmes.» Elle a alors cinquante-six ans, un âge où l'on peut enfin avoir pactisé avec son propre passé. Elle est, dans ces années, en pleine lumière, reconnue, respectée, admirée, courtisée.

Pourquoi ce trouble avoué d'une enfance dite du genre «bizarre» ? L'absence du père ? Oui, sûrement. Elle a un an et sa soeur cinq quand, de France, la terre d'exil qu'il s'était choisie, il embarque pour les États-Unis. Il avait souhaité se faire enrôler dans l'armée américaine pour combattre, mais avait été refusé en raison de son âge. Salih Gourdji, le Turc d'Istanbul, est donc parti dans le dessein de continuer le combat démocratique pour les Balkans avec l'espoir de voir se concrétiser un jour la création d'une supranationalité ottomane. Il va être vite déçu. On le constate en lisant la presse intellectuelle de l'époque : s'il est bien accueilli par des cercles d'étudiants et d'enseignants et par ses frères exilés, la cause qu'il plaide, si elle est comprise, n'enthousiasme pas et ne provoque pas les effets escomptés. Et pourtant, il reste sur place et continue à faire des conférences, des débats pour mobiliser l'opinion et récolter des fonds.
On peut même se demander s'il n'a pas souhaité rester aux États-Unis et y faire venir sa femme et ses enfants.

Il a sans doute envie de recommencer sa vie sur de nouvelles bases. Pourtant, il a fait ses études à Paris et a épousé Elda, vingt ans, lui vingt et un, à la mairie du VIIIe arrondissement. Mariage fastueux, mariage d'amour entre deux êtres de milieux sociaux homogènes, la grande bourgeoisie, elle de Salonique, lui d'Istanbul. Des jeunes gens cultivés, engagés politiquement et qui ne pensent qu'à vite revenir à Istanbul pour continuer leur lutte politique et intellectuelle pour la démocratie. Ce qu'il fait. Il fonde d'abord à Constantinople, puis à Istanbul, en 1909, l'Agence télégraphique turque, dont il est le président et le propriétaire. Djénane naît à Constantinople en 1910. Françoise disait que sa mère aimait raconter ces années heureuses. Luxe, considération et volupté. Salih a de hautes ambitions. Un document du Quai d'Orsay l'atteste : il vient à Bagdad poser sa candidature à la Chambre ottomane comme militant du comité Union et Progrès, dénomination des Jeunes-Turcs, parti politique et révolutionnaire qui souhaite restaurer la Constitution ottomane de 1876. Sans succès. Mais il devient rapidement un leader progressiste reconnu, non seulement dans son propre pays, mais aussi à l'étranger : ainsi est-il invité par l'ambassadeur de Russie en France à faire des conférences sur son mouvement, dès les débuts de 1911.
 

Revue de presse

Avec empathie mais sans complaisance, Laure Adler trace le destin romanesque de France Gourdji, fille d'un journaliste turc réfugié en France pour raisons politiques, devenue par sa seule détermination Françoise Giroud, première femme journaliste à la tête d'un hebdomadaire politique pendant plus de deux décennies...
Qu'est-ce qu'une biographie, si ce n'est mettre en lumière les lignes de force et la direction d'une vie, plus que de remuer le «misérable petit tas de secrets». Avec «Françoise», Laure Adler remplit très bien ce cahier des charges. (Le Nouvel Observateur du 13 janvier 2011 )

Elle sentait le parfum Vol de nuit de Guerlain, parlait d'une voix très douce pour dire parfois des choses rudes, avait un sourire ravageur et... une plume qui fut son arme pour la vie. Françoise Giroud, décédée le 19 janvier 2003, était devenue une légende vivante. Laure Adler, dans un livre extrêmement bien documenté, sobrement appelé Françoise (Grasset), raconte le destin hors du commun de ce personnage exceptionnel...
Sa vie, Laure Adler le souligne avec précision et amitié, a été marquée par beaucoup de drames. Enfance difficile dans une famille déclassée, perte prématurée du père, naissance non voulue en pleine guerre d'un fils qui finira par se tuer en montagne, deuils de sa soeur, de sa mère et de son dernier compagnon, Alex Grall...
Cette femme de combat, notamment pour ses congénères, qui ne pouvait terminer une semaine de vacances sans les interrompre pour revenir travailler, a regardé venir la mort en face. Jusqu'au bout, elle s'est efforcée de faire bella figura. Et puis, elle s'en est allée, sans faire de bruit, après une vie bien remplie. (Le Point du 13 janvier 2011 )

La force de son travail, pourtant, tient à autre chose qu'à son aspect documentaire, si complet soit-il. Car plus qu'une biographie, au sens classique du terme, Françoise est une rencontre. Le résultat d'un face-à-face entre deux femmes, l'une observant l'autre depuis le balcon de sa propre vie, de sa connaissance du monde et de sa sensibilité. Du coup, le texte qui émerge de cette confrontation est l'inverse d'un récit sec et minutieux. Comme l'indique le simple prénom choisi pour titrer le livre, Françoise est l'expression d'un regard - tour à tour amical, admiratif, perplexe, sans illusion ou même, en une occasion, complètement écoeuré - mais aussi d'une forme de complicité. Laure Adler entre dans la vie de son sujet par une chronologie souple, qui n'enferme pas les individus dans les contraintes d'un temps trop strict. Pour éclairer le parcours et la personne de Françoise Gourdji, devenue Giroud, sa biographe a choisi de l'approcher par la face des passions. (Le Monde du 20 janvier 2011 )

Quand mourut Françoise Giroud (1916-2003), la quasi- totalité des médias lui rendirent un hommage spectaculaire : couvertures de nombreux magazines, émissions spéciales, témoignages innombrables. Une avalanche d'éloges et de larmes que certains jugèrent disproportionnée. De quel royaume cette femme avait-elle donc été la reine ? D'où cette princesse tenait-elle cette aura ? Quelle avancée de civilisation avait-elle donc permis à la France et au monde ? Cette femme traitée comme... un «grand homme», au fond, qui était-elle ?...
Laure Adler, qui éprouve pour son personnage une fascination bienveillante dont elle ne se cache pas, n'a pas ajouté vainement une couronne de fleurs fraîches à celles qui, il y a huit ans, surabondèrent. Elle a mené une longue enquête, interrogeant des témoins, visitant quelques lieux où vécut Françoise Giroud, fouillant des archives, lisant, avec l'autorisation de Caroline Eliacheff, la fille de Françoise, le courrier intime qu'elle laissa derrière elle non sans un tri soigneux. Il en résulte un livre qui ne cache que... l'introuvable. (La Croix du 26 janvier 2011 )

Après Christine Ockrent en 2003, Laure Adler livre une biographie de la «panthère», affectueusement intitulée Françoise. Tout n'est qu'empathie et admiration dans ces 490 pages, qui se lisent d'un trait. C'est un livre d'histoire et d'histoires, l'ascension d'une femme de pouvoir, fragile sous les apparences, mêlée aux événements du XXe siècle, de la Résistance au 10 mai 1981, en passant par toutes les aventures médiatiques (Elle, l'Express, le Nouvel Observateur) et les tourments d'un amour éternel et désespéré pour JJSS. (Libération du 3 février 2011 )

L'amour-propre lui fit commettre des erreurs, voire des injustices ; la volonté l'entraîna jusqu'à l'entêtement, voire l'aveuglement. Et elle devint, à L'Express, un mythe, c'est-à-dire, un peu, une prison pour elle-même. Par-delà la scène où brilla la grande dame, Laure Adler s'est attachée à explorer les coulisses parfois glacées d'un destin hors normes. Celui d'une infatigable pionnière. (L'Express du 13 janvier 2011



18/09/2012
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